Mois: avril 2014

A bas les chômeurs…

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Les mois se suivent et se ressemblent, la politique des socialistes ne change pas, le cap est donné : c’est le choix de l’austérité, du chômage et de la pauvreté. Les arguments des socialistes ne tiennent pas une seconde, il faudrait détruire l’ensemble de notre modèle social, geler les prestations, baisser les salaires, baisser les dépenses publiques pour répondre au Diktat de la Troïka, du FMI mais surtout des marchés financiers. Personne n’est dupe, la politique des socialistes n’est pas tournée vers les français et les citoyens mais vers les rentiers. La France grâce à Hollande a perdu toute souveraineté politique et économique en acceptant de se coucher devant le regard inquisiteur de la finance et de la commission européenne. C’est tout l’enjeu, le dernier bastion d’une protection sociale ambitieuse doit mettre genou à terre. Il faut un exemple à l »ensemble de l’Europe, la protection sociale est morte pour vous tous… Toute la politique des socialistes est de faire accepter cela, l’UMP n’a pas réussi, le PS est en passe si nous nous opposons pas.

Que les socialistes ne soient plus à gauche, nous le savons depuis 1983, mais à ce stade ? Tout le logiciel idéologique du néolibéralisme est accepté, jusqu’à ce qui faisait encore la différence : la compréhension des origines du chômage. Les socialistes ont intégré que le chômage est la faute…  essentiellement des chômeurs et des travailleurs. Alors que  depuis Keynes et Marx, nous savons très bien que les entreprises et les chômeurs n’ont aucun pouvoir sur l’emploi, le point essentiel est la valorisation sociale de la production et donc les besoins globaux, l’ajustement est réalisé par les quantités et non les prix. Vous pouvez diminuer les salaires à 1 euros de l’heure mais si il n’y a personne pour acheter votre production… L’emploi et le production dépendent des grandes variables macroéconomiques qui impulsent les choix. Il semblait que la crise des années 30 avait permis à l’économie et à la société de comprendre certaines logiques, ce n’est pas le cas. Nous avons à plusieurs reprises ici, ici, ici ou , montré la bêtise du pacte de responsabilité et de la politique de l’offre. Mais concernant le chômage, quel est ce positionnement idéologique accepté par les socialistes ?

1. Le chômeur est chômeur… car il le veut bien

Toute la pensée néolibérale part de ce principe : il ne peut y avoir que du chômage volontaire. Dans le meilleur des mondes, le marché du travail est libre, la concurrence non faussée, les salaires doivent s’ajuster automatiquement de telle sorte qu’à un niveau de salaire réel d’équilibre, la demande de travail trouve l’offre et le plein emploi est assuré. On raisonne en termes de salaire réel, c’est-à-dire inflation défalquée, ce n’est pas le salaire inscrit sur votre feuille de paie, mais le salaire réellement consommable et utilisable. Et oui, vous avez, nous avons tous la capacité à connaître précisément le niveau de notre salaire réel pour prendre nos décisions… Donc à ce niveau de salaire réel d’équilibre, s’il y a du chômage, c’est simplement le fait qu’une partie des chômeurs refuse de travailler, car le salaire serait trop bas. Ainsi, il faut les inciter à travailler et donc supprimer les prestations sociales, les allocations chômage, et tout ce qui n’incitent pas au travail. De plus, il ne faut surtout pas d’intervention extérieure qui vienne impacter le salaire réel comme les cotisations sociales car le salaire d’équilibre en serait affecté, c’est à dire que le salaire augmente sans aucune raison économiquement valable et donc la demande de travail (des employeurs) diminue quand l’offre de travail (des travailleurs) augmente. Ainsi, il n’y a plus d’équilibre possible car l’ajustement ne peut se réaliser. Les employeurs limitent leur offre de travail, il y du chômage. L’UMP ne cesse d’expliquer qu’il faut «  une plus grande dégressivité de l’indemnisation chômage des demandeurs d’emploi ». Bien sûr et c’est bien connu, il y a donc environ 3 millions de chômeurs et 3 millions d’offre d’emplois… les chômeurs sont bien des fainéants ! Un petit tour sur le site de pole emploi et on a vite compris la bêtise… il n’y a que 190 000 offres

Par la suite, au salaire réel d’équilibre (w/p)  un niveau de production est possible… voilà pourquoi tout le débat porte sur l’offre  et le coût du travail, tout part de ce présupposé faux : le coeur central de l’analyse est le marché du travail : voir graphique ci-dessous, le premier concerne le marché du travail, le second la production globale. Le niveau de salaire réel permet un niveau de production d’équilibre. La Baisse du salaire (W/P) permet une hausse de la production (Y). Ici, pas de problème de débouchés, car l’offre crée sa propre demande, ce niveau de production optimale est entièrement acheté et consommé. On se demande bien pourquoi il faille défendre le commerce international s’il n’y pas de problème de débouchés… à quoi bon vendre à l’étranger si la production est écoulée dans le territoire national, peut-être parce qu’il y a un problème de surproduction ?

Nouveau Présentation Microsoft Office PowerPoint

Toute la politique des socialistes part de ce postulat : le coût du travail est trop élevé. Ce postulat est exactement le postulat néolibéral.

 

2. Mais ça ne marche pas comme cela !

S’il y a du chômage, ce n’est bien sûr pas la faute des chômeurs. Regardons vite-fait le nombre d’emplois proposé par Pole emploi : il est à ce jour de 191 161 offres et il y a 3 349 300 demandeurs d’emploi en catégorie A. Le différentiel est énorme ! Les tenants du néolibéralisme vous expliquent que ce niveau est le reflet d’un salaire trop élevé, en le diminuant, les entreprises pourront créer plus d’emplois et nous aurions progressivement le plein emploi. Mais alors, admettons que le SMIC diminue, ce qui va être le cas très prochainement avec la suppression des cotisations sociales, alors les entreprises comme par enchantement vont pouvoir par un coup de baguette magique créer 1 million d’emplois [d’après Gattaz, mais il n’en est plus très sûr le bougre] ! Ce qui veut dire, qu’il restera 2 millions de personnes au chômage, mais nous dira Gattaz, c’est qu’ils le veulent bien.

Pas besoin d’être économiste pour comprendre l’absurdité. En ce moment, nous expliquent le MEDEF et leurs alliés socialistes, les entreprises auraient un besoin potentiel d’1 million d’emplois, impossible à pourvoir car les salaires sont trop élevés, cela veut dire qu’il existe donc une production potentielle énorme en attente. Mais s’il y a production en attente, il y a donc demande en attente non ? Logique. Et bien non, il n’y a pas de demande en attente (voir graphique suivant), les entreprises n’ont aucune vocation sociale, si elles produisent, c’est pour gagner de l’argent et donc vendre. A l’heure actuelle, d’après l’INSEE et l’institut patronal Rexecode, le coût moyen d’une heure de travail en France est de 34 euros et la productivité française de 45,6 euros par heure. Donc, si les entreprises ne produisent pas et n’emploient pas, c’est tout simplement parce qu’il n’existe pas de demande SOLVABLE puisque les entreprises françaises sont profitables. Baisser les salaires, c’est baisser le pouvoir d’achat et donc le risque de la déflation nous guette. Mais les socialistes n’ont rien compris, et ne veulent pas comprendre, ils sont dans une logique de politique de classe sociale tournée vers le rentier et non vers la salariat.

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Les mythes fondateurs de l’Europe… et du TAFTA

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A quelques semaines des élections européennes, les médias semblent s’intéresser subitement au traité commercial transatlantique (TAFTA) et c’est une bonne chose ! Même le Monde qui ne peut pas être taxé de gauchisme primaire s’est lancé dans une analyse du traité. Sud Ouest, oui vous avez bien entendu, Sud Ouest, a sorti un court article consacré au sujet qui recense l’ensemble des sites et articles qui dénoncent le traité, ATTAC est même citée. Le mouvement social qui a pris à bras le corps cette question trouve enfin un relai médiatique. Or, un risque majeur apparaît, et c’est le revers de la médaille, les médias vont certainement recentrer le débat sur le FN. Ce danger nous guette et nous devons apporter des arguments forts et clivant. Pour cela, il convient d’apporter des éléments de compréhension et d’analyse et de voir quels sont les fondements et présupposés (théoriques) du TAFTA, qui sont exactement les mêmes que ceux de la création du marché unique européen préalable à l’Union européenne.  Tout cela forme une belle mythologie dramatique fondée sur des présupposées, des idées fausses et des croyances.

1. Des fondements théoriques…

Le TAFTA et l’Europe économique sont basés sur quatre postulats :

(i) Le marché : il est une institution de progrès social et de bien être. Pour cela, un seul préalable, le marché doit être libre de fonctionner sans intervention extérieure par définition néfaste. On entend ici une intervention politique. Les prix doivent se fixer sans contraintes permettant un équilibre entre l’offre et la demande et donc débouchant par ajustement automatique sur une production optimale et l’usage de tous les facteurs de production à ce prix d’équilibre. De plus, le marché est naturel et à la base de toutes les sociétés.

(ii) Les marchés doivent tous être libérés de contraintes extérieures, ce qui permet l’équilibre général de l’économie, le plein emploi. Tout équilibre général est un optimum, tout optimum est un équilibre général.

(iii) Le commerce tient une place prépondérante, les hommes ont toujours eu tendance à l’échange, mais l’échange marchand est valorisé. Depuis les Lumières et Montesquieu, « le doux commerce » pacifie et enrichit les hommes. En opposition aux Mercantilistes et autres colbertistes, le commerce est érigé en sacro-saint graal. Pour cela, il ne manque qu’une théorisation pour faire scientifique. La question centrale de la spécialisation des économies se posent : Smith et les avantages absolus, je me spécialise où je suis absolument le meilleur, Ricardo et l’avantage relatif car chez Smith certains pays étaient potentiellement exclus de l’échange, ici la spécialisation est réalisée dans les domaines où vous êtes le moins mauvais, et HOS, théorie centrale et dominante, un pays se spécialise dans les domaines où il détient un avantage en termes de dotations factorielles, s’il y a plein de chinois et donc plein de travail, la Chine se spécialise dans les productions qui nécessitent plein de travail… Ici aussi, le marché est central, il devient international donc les points (i) et (ii) s’appliquent à l’humanité.

(iv) La concurrence fait baisser les prix… et elle est bénéfique.  Donc, l’offre est l’enjeu majeur.

2. Mais nous sommes dans la mythologie

Donc nous aurions quatre préalables théoriques fondamentaux, qui ne seraient en aucun cas discutable. Toutes les croyances mythologiques sont basées là-dessus, on n’est pas sûr qu’Ulysse ait existé mais on y croit quand même. Enfin, du moins sous l’Antiquité. Serions-nous aussi à l’orée d’une antiquité économique ? A coup sûr, nous sommes dans le mythe :

(i)  Le grand apport, ou un des grands apports, de Keynes et de toute l’économie hétérodoxe est fondé sur la déconstruction de l’autorégulation des marchés. La crise de 1929 a apporté les premiers éléments factuels, l’instabilité chronique des marchés financiers aussi. Dans la pensée libérale, l’homme est résumé aux comportements mécaniques et calculateurs recherchant son propre intérêt égoïste. Or, Keynes a montré le rôle des émotions, du mimétisme, de la confiance, des comportements animaux (donc non rationnels)… Ainsi, dire mener une politique de l’offre est une aberration intellectuelle (ici  ou ici) !

(ii) le mythe du marché comme autorité naturelle et institution de bien être fut aussi battu en brèche par l’anthropologie et la socio-économie. Les apports de Polanyi en la matière sont fondamentaux. Le marché est une construction sociale et humaine, il a besoin de règles et de normes, et historiquement il n’est qu’une parenthèse, certes pas refermée, et surtout non universelle. Il faut lire et relire Braudel, Polanyi donc, mais aussi Laurence Fontaine, Graeber, René Passet, et j’en oublie… Sans règles et normes le marché, et l’étape ultime la société de marché, est une institution potentiellement dangereuse qui déstructure les relations sociales qui deviennent impersonnelles. Sur ce blog nous avons beaucoup traité de ces questions dont ici

(iii) le mythe du commerce international facteur de croissance, de bien être et tutti quanti… un auteur a démontré qui c’était plus complexe que cela : Bairoch. Dans son ouvrage mythes et paradoxes  de l’histoire économique, Bairoch montre que si le libre échange est vanté par tous, il n’est pas présent dans l’histoire et les pays protectionnistes (dont la Suisse) ont eu des résultats économiques majeurs. Une brillante thèse est en cours à Bordeaux sur ces thématiques. Bairoch estime que le XIXe siècle est « un océan de protectionnisme cernant quelques ilots libéraux ».

(iv) sur la concurrence, voir ici sur ce blog.

3. L’Europe est économique avant d’être politique : déconstruction de l’idéal libéral

 L’idée même d’Europe unie à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale est une idée audacieuse et brillante, deux guerres monstrueuses, la concurrence et la non coopération entre les peuples, la haine nationaliste, il convenait de créer un espace de paix, et potentiellement lutter contre l’URSS. Mais, il n’était pas possible quelques années après la capitulation de l’Allemagne Nazi de créer une vaste entité politique, communautaire et intégrée. Ainsi, pas d’union politique véritable mais une union économique pour reconstruire l’Europe. Une coopération économique qui devait à terme déboucher sur une communauté et intégration politique. L’Europe s’est faite sur des considérations économiques et la création d’un vaste marché…

On comprend rapidement qu’elles ont été les préalables théoriques à l’intégration économique. N’ayant pas d’autorité politique (Etat ou autre forme d’organisation), la coopération économique et le grand marché doivent être fondés sur des préalables et donc des règles uniques. L’Allemagne, n’ayant pas tourné la page de l’hyper inflation et du chômage de masse qui ont été les causes de la montée du nazisme, a imposé des règles strictes de savoir vivre ensemble, et surtout de savoir commercer et échanger. Le marché n’étant pas l’institution naturelle, il doit être encadré par des normes, surtout si plusieurs Etats très différents participent à la communauté économique. Ainsi, sans autorités politiques et souveraines, des règles technocratiques fondent l’organisation économique de l’Europe. Un marché unique et international a besoin de règles, ce qui tord le coup à tous les présupposés libéraux qui estiment cette institution comme la forme naturelle de toutes les sociétés. L’Europe actuelle est fondée sur la création d’un marché unique et donc sur l’ensemble des fondements théoriques présentés précédemment : marché source de croissance, progrès et bien être, le commerce comme pacificateur des mœurs et des relations humaines, et la concurrence libre et non faussée (cf : vous voyez où je veux en venir… le fameux article du TCE de 2005) source de prospérité. L’imposition du marché unique nécessitait donc des règles… et sans Etat elle est dans l’incapacité de mener une politique économique commune et l’organisation de structure de services publiques, l’Europe est donc fondamentalement une entité d’économie libérale. Il ne peut en aller autrement. Il n’existe aucune expression sociale ou sociétale du vivre ensemble sans autorité politique souveraine et représentative. Ainsi, l’Europe n’est qu’économique, elle est structurée par des lois économiques, qui sous couvert d’une croyance mythologique en sa légitimité, organisent la vie européenne. La commission européenne technocratique est garante des traités fondés sur une organisation qui est structurée par des règles et un ordre juridique pour que les relations économiques ne soient pas faussées par des considérations politiques et sociales. Ces règles de savoir-vivre et échanger doivent garantir une harmonisation européenne, certes fondée sur des mythes qui pèsent sur l’échec actuel de l’Union Européenne.

Pas d’Etat ou d’autorité politique mais un marché unique, le rêve de tous les libéraux du monde entier. Mais, il fallait pour améliorer le fonctionnement et l’intégration économique que ce marché unique trouve… une monnaie unique pour éviter toutes politiques non coopératives de dévaluation et pour éviter les concurrences monétaires. L’Europe a donc imposé une monnaie unique organisée comme le reste du marché unique par des règles strictes et normes libérales : une BCE qui n’a qu’un rôle de stabilité monétaire. La monnaie unique est considérée par ses promoteurs comme un voile, essentiellement un  intermédiaire des échanges, soit l’expression moderne de la fable du troc… Ces positions considèrent que la monnaie est une marchandise comme les autres et qu’elle n’a pas besoin de régulation politique et sociale. Or, Aglietta, Orléan, Keynes, Mauss, et d’autres comme Servet, Zelizer ou Blanc ont montré le caractère profondément social de la monnaie et son rôle actif. Elle ne saurait être une simple expression économique. La monnaie fonde les sociétés et les régulent. Choisir une organisation essentiellement économique de la monnaie est une erreur, elle doit faire société et participer conjointement à la réalisation d’un espace public au même titre qu’une autorité politique. La monnaie unique sans politique unique est inconcevable et intenable. Le débat sur l’euro est légitime mais complexe quant à savoir s’il faut en sortir ou non. Ici, nous ne prendrons pas parti.

4. Et le TAFTA : une mythologie moderne

Le TAFTA est basé sur l’idée que le commerce international permet de faire jouer la concurrence entre les économies par le libre échange et grâce aux marchés autorégulateurs et intégrés, les prix peuvent diminuer et donc la croissance et l’emploi seront au rendez-vous…

Or, nous avons bien vu précédemment que ce postulat était fondé sur des mythes. De plus, le commerce des pays européens est à plus de 70% intra Europe, quel est donc l’intérêt de libéraliser les échanges entre l’Europe et les Etats-Unis ? L’enjeu majeur et premier est l’accaparement par le secteur privé de pans entiers de secteurs protégés pour le bien être des populations et d’imposer des normes privées.  Partout où les autorités politiques ont créé des protections contre les dérives de l’accumulation, le traité de libre échange viendra détruire ces protections sous couvert d’efficacité économique. Comme pour l’Union Européenne, n’existant pas d’autorités politiques internationales, des règles uniques fondées sur les présupposés libéraux doivent s’imposer. Il n’est pas étonnant qu’un tribunal privé arbitral prenne toute sa place dans l’architecture imposée. Le politique étant néfaste et rendant instable les normes économiques naturelles, il est nécessaire de laisser aux mains d’un organe privé la gestion des différends commerciaux. Ce traité, comme beaucoup d’autre, renverse clairement ce qui fonde le politique, l’intérêt privé devient supérieur à l’intérêt commun et collectif. Ce traité est fondé sur un parti pris idéologique qui marque une nouvelle phase du désencastrement de l’économie du social et de la société, l’économie devenant une sphère dominante, or, n’oublions pas que ce processus n’a jamais apporté autre chose que la déstructuration des sociétés et la montée des fascismes qui font leur nid du terrible « il n’y a pas d’alternative » qui rend les partis politiques de gouvernement interchangeables et soumis aux intérêts des groupes privés dominants. La France des années 30 était structurée par des syndicats et une conscience politique républicaine et sociale née des années de lutte des classes, la France des années 2010 se décompose sous la précarisation, la pauvreté, la résignation, l’inconsistance coupable et complice des socialistes avec les intérêts du capital, et les inégalités. Espérons que l’idéal républicain et social demeure dans l’inconscient collectif, ou les lendemains ne risqueront pas de changer mais plutôt de se brunir…

Ce soir, la Protection sociale est morte…

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L’UMP en rêvait, les socialistes l’ont fait !

Ce soir le France n’a plus de protection sociale, à moins que certains socialistes aient le courage de ne pas voter la confiance du gouvernement. C’est une purge à laquelle nous assistons, après des décennies de combat, les socialistes ont enterré le contrat social de notre pays.

Ils n’ont donc rien compris, ou plutôt ils terminent le projet de société débuté en 1983. Comment peut-on accepter ce projet de société ? Comment des gens qui se réclament socialistes peuvent accepter et voter la confiance du gouvernement ? Les socialistes ont choisi leur camp. C’est beau de montrer les muscles dans la presse, de crier le refus du social-libéralisme, mais l’appel de la cantine est trop forte. MERCI, MERCI aux socialistes pourfendeurs de la protection sociale. Ce gouvernement doit être combattu, nous n’aurons rien de leur part, la résistance doit s’organiser. Car, Valls et les socialistes crachent sur nos glorieux martyrs de la résistance, ceux qui ont permis l’Etat social quand le patronat organisait la collaboration… avec la complicité de certains fonctionnaires bien connus…

RESISTANCE le 12 avril le 12 avril, tous à Paris !

Mais, voici les annonces de Valls [voir Le Monde] :

« il avait en effet annoncé devant les députés socialistes des économies supplémentaires par rapport aux 50 milliards d’euros prévus pour financer des mesures en faveur des ménages les plus modestes. Il enchaîne une série d’annonces sur la fiscalité » :

un allègement du coût du travail à 30 milliards d’ici 2016, Quand l’incompétence et le mépris de classe s’arrêtera, il n’y a pas de problème de coût du travail en France ! voir ici ou ici

une suppression totale des cotisations patronales à l’URSAFF au 1er janvier 2015 C’est fait… qui va financer la Protection sociale ? Le choix est clair, les assureurs se frottent les mains, le partage de la valeur ajoutée au profit des entreprises va encore s’améliorer… belle justice sociale ! Voir ici ou ici

une suppression des charges pour un employeur d’un employé payé au smic DONC baisse du salaire socialisé ! et pour quels résultats ? La hausse des dividendes, voir ici

un abaissement des cotisations familiales de 1,8 point au 1er janvier 2016 – 4,5 milliards d’euros d’allègements, qui seront compensées par « d’autres recettes » Chez les technocrates cela veut dire hausse de la CSG ou de la TVA…

une réduction du taux normal de l’impôt sur les sociétés à 28 % en 2020, en 1986 à 33% en 2007, pour quel résultat ?

une réduction de la C3S (contribution sociale de solidarité des entreprises), supprimée sous 3 ans SUPPRESSION d’une contribution de solidarité !!!! MERCI QUI ?

une suppression de la surtaxe sur l’impôt sur le résultat des sociétés instaurée par Sarkozy : le taux normal sera abaissé à 28 % en 2020, avec première étape intermédiaire en 2017 ?????? c’est une blague ?

une diminution des cotisations salariales pour les salariés au smic, ce qui représentera 500 euros par an de salaire net en plusAu delà de la malhonnêteté, SI ET SEULEMENT SI le patron le souhaite, c’est la même situation que pour la baisse de la TVA dans la restauration !

CONCLUSION :

Les socialistes s’attaquent au financement de la protection sociale pour la détruire. Nous vivons un ajustement structurel comme jamais, un transfert de la sphère non marchandes aux requins de la finance. LE PS NOUS A TUE !

Anthropologie économique des Schtroumpfs

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Le Schtroumpf financier…

Qui aurait pu penser qu’une BD puisse apporter à l’économie politique ?

Le Schtroumpf financier est de celle-là. Tout le monde connait cette petite communauté d’hommes bleus. Cette société est fondée sur des échanges non marchands mais surtout non monétaires (au passage on rappelle les articles sur ces concepts ici).

En effet, les schtroumpfs vivent dans une société de don et donc de contre-don, l’accumulation n’existe pas. L’économie schtroumpf est fondée sur une spécialisation forte et une répartition des tâches et du travail très codifiée, chaque membre à un rôle particulier, nous avons en fait une société de petits producteurs individuels qui agissent pour le bien du groupe. Cette société n’étant pas fondée sur un régime capitaliste, il n’y a pas de salariat, pas d’exploitation du travail, et pas de profit monétaire, ce qui ne veut pas dire qu’il n’existe pas de domination. Si profit il y a, il se comprend comme un gain social supplémentaire pour la collectivité. Ainsi, la société se perpétue car chaque individu a une place prédéfinie, un rôle social et économique. Les schtroumpfs ont donc un savoir, une compétence qu’ils échangent contre d’autres savoirs ou compétences. Aucun passager clandestin dans cette société, hormis peut-être le schtroumpf paresseux, mais il est plutôt considéré comme malade et donc il peut bénéficier de l’échange sans apporter sa contribution. Bref, cette société fortement encadrée et hiérarchisée fonctionne sans argent. Les schtroumpfs étant immortels, du moins c’est une hypothèse crédible, la monnaie n’est pas nécessaire pour perpétuer la société, on peut penser qu’il n’y a pas de dette de vie.

Or, dans le schtroumpf financier, un intrus apparaît… à la suite d’un malheureux accident, le grand schtroumpf est grièvement blessé. Il faut vite demander l’aide du magicien Homnibus. Les choses vont se gâter. Le petit schtroumpf qui fait le messager va devoir aller dans le village des hommes avec Olivier pour récupérer des herbes pour soigner le grand schtroumpf. Quand Homnibus donne de l’argent à Olivier, voilà notre petit schtroumpf désarçonné, à quoi sert l’argent ? Lorsqu’il pose cette question, on sent un petit désarroi d’Olivier… qui néanmoins lui explique le fonctionnement. Quand ils arrivent au village, Olivier explique qu’il faut gagner son argent, et donc… travailler contre rémunération, chez les schtroumpfs, ce n’est pas le cas, on travaille pour le groupe et en échange de services. Oliver présente une forme particulière d’échange principalement marchand.

De retour au village, le futur schtroumpf financier trouve l’idée originale et tente d’imposer l’argent au groupe. L’autorité morale et politique étant malade, il va pouvoir passer outre, et imposer l’argent. On comprend dès lors les difficultés, on retrouve les mêmes en Europe, une monnaie commune sans peuple et autorité politique qui en gère le fonctionnement. Une monnaie commune sans pouvoir politique. Bref, il se lance quand même dans l’aventure. Mais comment faire ? Il faut d’abord, pense-t-il, convaincre… et puis non, il décide de créer une monnaie. Le reste viendra tout seul se dit-il !

Et le voilà parti faire le tour des compétences, tout d’abord il va voir le schtroumpf peintre (p. 12) et lui commande un dessin : une tête de grand schtroumpf dans un cercle. Et oui, une monnaie est avant tout l’expression d’un pouvoir, qu’il faut légitimer. En associant le grand schtroumpf, en personnifiant la monnaie, on crée un sentiment d’appartenance à un collectif et à un groupe. Mais surtout on crée de la confiance, cette pièce avec l »expression de l’autorité va rassurer…

Ensuite, il faut fabriquer les pièces… là aucun doute, le schtroumpf mineur sera d’une aide précieuse. Celui-ci lui donne avec plaisir ce tas d’or inutile pour la collectivité, car « c’est un métal trop malléable. Il brille, mais c’est tout » (p. 14). Alors que le silex lui a un intérêt, surtout pour le schtroumpf maçon. Et voilà, notre financier avec un stock d’or qui fera bien l’affaire.

Pour le moment, notre schtroumpf financier est dans une logique de monnaie-marchandise, pour lui, c’est potentiellement qu’un intermédiaire des échanges, un simple outil, rien de plus. Les choses vont se compliquer car la monnaie est bien plus.

Il explique donc comment cela fonctionne (p. 18), et après une consultation pas très démocratique, ce que fera remarquer schtroumpf à lunettes, le principe est accepté ! Pour avoir l’unanimité requise, on vote pour le schtroumpf paresseux qui s’était endormi. Bref, un peu comme dans l’Union européenne, non ?

Maintenant, il faut partager l’argent, chacun a le droit à une part, inscrite dans un registre. Mais, premier problème, le financier prend une part double, ce que contestent les autres… mais tout est rentré dans l’ordre, le schtroumpf financier a des frais… et l’idée.

Le lendemain matin, les schtroumpfs découvrent l’usage de la monnaie… pas une ni deux, un gros problème apparaît (p. 20) : comment se fixent les prix ? Tous se retrouvent chez le financier pour lui demander, voilà sa réponse :

 » Bon calculons ! Si le paysans met autant de jours pour schtroumpfer un sac de blé et que le meunier achète ce blé autant, il peut schtroumpfer sa farine autant au boulanger qui lui pourra schtroumpfer son pain autant. Tout en tenant compte du temps passer à schtroumpfer et des frais fixe, on peut raisonnablement schtroumpfer que… »

Et oui, nouvelle considération d’économie politique, et même si Smith et Marx sont inconnus, la valeur des choses chez nos schtroumpfs est fondée sur le travail ! Quoi de plus normal…

La société de don, qui caractérisait les schtroumpfs, disparaît avec l’instauration de l’argent, mais les moeurs n’ont pas encore changé, quand il sera l’heure de manger, le schtroumpf cuisinier demandera le paiement du repas. Ce qui n’est pas bien accueilli. Car, si dans la société de don schtroumpf, chaque personne a une place et un rôle, la monnaie va modifier cet état, car des « professions » vont soit disparaître soit avoir de grosses difficultés. C’est le cas du schtroumpf musicien, qui avait le rôle social du divertissement, mais maintenant, il doit gagner son argent. Ainsi, il ne joue plus pour le groupe, mais pour lui et une rémunération. Idem pour le schtroumpf farceur… et je ne parle pas de la domination masculine, la schtroumpfette n’a plus aucune considération, car ses activités sont toujours non marchandes (le soins du grand schtroumpf par exemple).

Ainsi, une forme d’accumulation s’installe, surtout pour les schtroumpfs qui ont les activités les plus lucratives : boulanger, cuisinier… Que faire du stock d’argent obtenu ? Le schtroumpf financier va créer… la banque, l’intérêt, l’épargne et le crédit. Il y a tout un passage sur ce fonctionnement fort intéressant (p. 26 et 27). Le schtroumpf financier propose un placement à 6%, alors qu’il prête à 10%.

Le schtroumpf paysan, qui n’a aucune confiance dans le nouveau système de banque, va enterrer son argent, un chemin, il doit passer sur un pont, qui jadis était entretenu par l’ensemble des schtroumpfs car c’est un bien commun et fort utile, mais maitenant que la logique marchande s’est installée et faute d’Etat pour financer les biens collectifs, aucun entretien n’est réalisé. Le pont s’effondre… Toute ressemblance avec l’Europe n’est pas fortuite. N’ayant pas d’autorité politique, de gouvernement européen, il ne peut y avoir de politique commune efficace, l’Europe ne prend pas en compte les services publiques et ne lève pas d’impôts, idéologiquement, les biens communs, publics et les services publics doivent être privatisés. La situation des schtroumpfs est la même. Pas d’Etat, pas d’impôts, donc de projet de société, alors les services qui devraient être publics sont appropriés par le secteurs privés, p. 30, le schtroumpf financier propose de réparer le pont… il y aura maintenant un péage ! Le schtroumpf bricoleur pour avoir le marché, va devoir faire un devis… grâce à une corruption orchestrée, il pourra avoir un prix intéressant. Toute ressemblance avec les marchés publics..blablabla…

Un autre phénomène apparaît très rapidement… le surendettement avec un système proche des subprimes. En effet, le schtroumpf financier prête de l’argent… contre hypothèque ! Le schtroumpf coquet n’ayant plus de garanti, il ne pourra plus obtenir de crédit…

Après une petite histoire avec Gargamel, le grand schtroumpf souhaite organiser une grand fête, mais sans argent… elle n’aura jamais lieu ! La société schtroumpf commence à se déliter, les inégalités explosent entre ceux qui ont une activité rentable et les autres, donc entre ceux qui ont l’accès à l’argent et les autres. Le schtroumpf paresseux ne dort plus,  le travail prend une place surdimensionnée, l’entre aide n’existe plus car l’argent a imposé un nouveau mode de pensée. Le schtroumpf financier s’est enrichi quand les autres tombent dans la misère.

La colère gronde, les schtroumpfs quittent le village pour retrouver une vie meilleure. Ainsi, tout rentrera dans l’ordre et les pièces d’or seront fondues pour faire de nouveaux instruments de musique.

Que retenir de cette BD. Plusieurs choses :

1. La monnaie n’est pas un simple intermédiaire des échanges, la fable du troc est un mythe. La monnaie est une institution sociale, elle fonde la société et ne peut être considérée essentiellement sur des considérations économiques. Quand c’est le cas, et quand monnaie est considérée comme une marchandise et non comme un signe d’appartenance, les plus grandes difficultés apparaissent et de nouvelles valeurs s’imposent.

2. La monnaie sans pouvoir politique est vouée à l’échec, la monnaie sans légitimation est vouée à l’échec. Une autorité politique est essentielle dans sa gestion. Elle est un bien collectif, l’appropriation privée de la monnaie est déstructurant. Une régulation sociale, politique et économique est nécessaire et surtout légitime son usage.

3.  Dans le cadre des schtroumpfs, la monnaie est perçue par son fondateur essentiellement sous la forme conceptuelle d’une monnaie-marchandise, ainsi, il pensait bien faire, l’introduction de celle-ci devait améliorer les échanges. Or, l’imposition forcée de la monnaie a eu un impact social qui a mis en mal la société de don, car une forme de comportement utilitariste s’est imposée ainsi que des formes de domination.

4. L’ensemble de l’échange non marchand a disparu, tout a un prix.

5. Ainsi, il convient de concevoir la monnaie sous des considérations non économiques, si la monnaie est un phénomène universel, sa conception purement marchande n’est qu’une vision de l’esprit idéologique et restreinte à des sociétés particulières. Si le capitalisme a imposé cette vision, il est nécessaire d’en dépasser cette simple expression. La situation européenne est un bon exemple.